Nous étions cinq garnements, trois garçons et deux filles, qui formions le redoutable " Gang des Sucettes ". En fait, je devrais dire quatre garnements, car, l' une des filles était très raisonnable et sage, et.....ce n' était pas moi. (Elle va se reconnaître).
Nous sévissions toutes les journées des grandes vacances, sur une plage que nous considérions comme la " nôtre ", et qui était, forcément, la plus belle de toutes : la plage des Abatilles à Arcachon.
On y accédait par un large escalier de béton qui dégringolait de la dune. Tout en haut, au début de l' escalier, se tenait un marchand de glaces ambulant avec son petit chariot. Les deux frères et moi achetions une glace pour trois, (pour faire durer notre argent de poche), que nous léchions consciencieusement chacun son tour, sans tricher. Ou alors, je ne m' en suis pas aperçue !
C' est sur cette plage que nous avons accompli la plupart de nos pires méfaits.
Elle était belle et sauvage, le sable était si chaud qu' on s' y brûlait les pieds. Il y avait le portique de Monsieur Maurice, qui était prof de gym au lycée Grand Air d' Arcachon, pendant la période scolaire.
Pour s' impressionner les uns les autres, on grimpait tout en haut du portique et on sautait, au risque de se casser une jambe. L' honneur était en jeu. Nous étions très contents parce que cela effrayait nos mères quand par hasard elles savaient où nous étions et nous voyaient.
On dévalait de la dune, directement dans l' eau, en éclaboussant tout le monde, et en visant, en particulier, les vieilles dames qui, jupes relevées, se rafraîchissaient les pieds au bord de l' eau.
On jouait aussi au volley-ball, avant qu' on ne le redécouvre en beach-volley.
Aujourd'hui, et depuis pas mal d' années déjà, la plage a été civilisée. Disparus la dune sauvage et le grand pin couché sur un chêne, dans lequel on grimpait pour bombarder avec des glands les imprudents qui prenaient leur bain de soleil par là.
A la place, une promenade, jolie, c' est vraie,
Et toujours la même beauté sereine l' hiver, quand la marée commence à découvrir les bancs de sable;
On s' y promène, tranquille, en humant les odeurs d' iode et de sable mouillé que ne masque pas celle des crèmes solaires.
Les pêcheurs au lancer ont repris possession du bord de l'eau, que les estivants accaparent dès le mois d' avril.
Mais, bien qu' il y ait encore de bonnes longueurs de plage bordées de pins,
On a défiguré " notre plage ".
Quand même ! Les fantômes des enfants que nous étions y courent toujours. Alors.........avait-on bien le droit de faire ça ???