Ce jour-là, m'avait dit ma mère, elle avait fait entendre à toute la ville son grave bourdonnement. Elle, c'est la Grosse Cloche, hébergée par une porte médiévale, l'une des deux anciennes portes de Bordeaux rescapées du Moyen-Âge : L a Porte St Eloi ou Porte St James.
Cette cloche est emblématique de la ville et les Bordelais y sont très attachés, à tel point que, lorsque le roi de France voulait les punir de leur insubordination quasi chronique, il faisait enlever la cloche; pour récupérer leur cher " bourdon " les vilains Bordelais rentraient dans le rang.
Elle fut même brisée par Henri II en punition de la révolte dite Jacquerie des Pitauds en mille cinq cent quarante huit, mais heureusement réparée, revint à Bordeaux en mille cinq cent soixante et un.
Au Moyen-Âge, elle sonnait en cas d'incendie et donnait chaque année le signal des vendanges. Depuis deux mille seize, elle sonne six fois par an :
* le 1er janvier
* le 8 mai, fête de la victoire de 1945
* le 14 juillet
* le 28 août, date de la libération de Bordeaux en 1944
* le 11 novembre ,date de l'armistice de 1918
* et le premier dimanche de chaque mois à 11h
Aujourd'hui donc, la grosse cloche va faire entendre sa voix. Même si je tends l'oreille, je ne l'entendrai pas, n'habitant plus Bordeaux depuis longtemps, et, malgré sa puissance, je doute que sa voix franchisse les dix huit kms qui nous séparent.
Mais, en bonne bordelaise que je suis restée, cette cloche née sous Aliénor d'Aquitaine, qui, malgré ses sept mille huit cents kilos et ses deux mètres de haut, trône à quarante mètres au-dessus de la rue St James, est pour moi un superbe symbole de liberté.