Au cours de sa déjà longue histoire, l'humanité a eu plusieurs fois recours à la destruction par le feu, en particulier de livres désavoués ou condamnés.
C'est ce qui se produit quand, dans un état autoritaire, des livres s'opposent à l'idéologie officielle. Ils sont alors considérés comme des outils de propagande, voire de contre-pouvoir, et dans ce cas, ils sont au mieux censurés, ou pire, brûlés sur la place publique.
Et ceci existe depuis l'Antiquité. Platon lui-même appelait à dénoncer et punir de la peine de mort, tous les impies, et en particulier le sophiste Protagoras qui écrivait pour Périclès des lois démocratiques. Ce qui a fait dire à Karl Popper que Platon portait en lui tous les germes des futurs totalitarismes. Il détestait tellement Démocrite qu'il aurait voulu qu'on brûla tous ses livres.
la Chine connut moult autodafés; déjà en 213 avant JC, il y eut un édit ordonnant la destruction de tous les livres opposés à l'idéologie de l'empereur. Cet édit était résumé dans la formule de Fenshu Kengru : " Brûler les livres et enterrer vivants les lettrés ". Les livres de Confucius faisaient partie de ces interdits.
Au Moyen-Âge, en Andalousie musulmane, le sultan exila Averroès au Maroc et ordonna l'autodafé de tous ses livres à Séville et à Marrakech. Quant à l' empire espagnol du XIVème siècle, dominé par l' Inquisition, il connut lui aussi ses autodafés n'hésitant pas à les étendre aux hommes eux-mêmes, jugés impies, juifs ou hérétiques.
En France même, des livres sont brûlés en place publique jusqu'au siècle des Lumières. Ainsi en mille sept cent cinquante huit, fut réduit en cendres, le livre d'un certain Helvétius, intitulé " De l'Esprit ", qui prônait des idées trop progressistes.
Le terrible XXème siècle européen, connut le dix mai mille neuf cent trente trois, initié par le troisième Reich et le parti nazi, un autodafé où furent brûlés plus de vingt mille livres. certains étaient signés Freud, Karl Marx, Stefan Zweig, Erich Maria Remarque.
C'est là que la phrase de Heinrich Heine prend tout son sens:
" Partout où l'on brûle des livres, on finit par brûler des hommes "
Et l'Allemagne de Hitler en donna un sinistre exemple.
Comble de l'ironie mauvaise : Einstein, réfugié aux USA, fuyant le nazisme, verra, au cours de la guerre froide, des milliers d'ouvrages censurés et détruits par le feu dans sa terre d'adoption.